BABEL (épisodes II, III, IV)


Texte pour le début de la partie II.

Tout le monde me demande des nouvelles de BABEL. Quand est-ce qu'peut-on voir la suite?. Personne ne me demande des nouvelles de ma santé. Comme si mon film était quelque chose hors de moi, hors de ma vie.
Et bien, ce n'est pas que je n'ai pas travaillé, j'ai même vécu. Et le temps a passé. Et le temps est le temps, on ne saura jamais aller plus vite. Je ne suis pas pressé: ni TGV, ni Mr Quick, ni super Fastman,ou Subito Presto.

J'avais pris (plus de) dix ans pour réaliser un premier épisode (Lettre à mes amis restés en Belgique). J'ai pensé que sur la lancée, j'irais un peu plus vite pour la suite, pour les suites.

Malgré le succès, imprévu, de Babel, je suis resté pauvre comme job, à continuer seul mon chemin de calvaire, dans l'indifférence des autres et du monde. O ce chemin s'est apaisé,j'ai rencontré quelques belles cavalières, des écuyères, des funambules et des pseudoprincesses et parfois des mamans. Ma vie fut pleine de surprises et de plaisirs.

Ephémères sans doute, et superficiels, mais c'est ainsi. Au fur et à mesure qu'on "prend de l'âge", on veut vivre le présent plus intensément, sans plus attendre, sans espérer des lendemains plus beaux.

Tout cela pour dire que la deuxième partie (le deuxième épisode de Babel) est largement entamée, et tournée, mais pas plus que pour la première, les producteurs, les financiers, les institutions, les soit-disant subsidieurs de ministères et de télévisions, ne me sont venus en aide. Et donc, fidèle à mon article 15 ("débrouille-toi!"), j'ai dû continuer sans eux. Je me filme, de temps en temps, régulièrement. D'abord mon corps, mes mains, mes pieds, mes yeux, mes cheveux, ce qui change et ce qui s'use, ce qui se détériore, mes dents aussi, ça n'est pas nouveau, mais je dois continuer ce que j'ai commencé. Ensuite mon lieu, mes lieux d'habitation, mes déménagements, mon itinéraire, mes itinéraires. J'ai appris à emmener ma caméra et mon équipe à l'étranger, un peu plus loin que ma rue et mon quartier, j'ai bougé, ma famille s'est élargie. Je veux essayer de montrer aussi ce que je n'ai pas encore montré, filmer ce que je n'ai pas encore filmé, façon dont je m'habille, où je me procure mes vêtements, restaurants où je vais manger, cinémas où je me rends, nouveaux amis,...et aussi j'essaye de filmer mieux ce que je n'ai pas bien filmé.

La suite de BABEL n'est évidemment pas la même dans ma tête que dans celle des spectateurs. Chacun espère que je continuerai comme j'ai commencé. La suite des aventures de Boris, qu'est devenu ce petit homme déprimé et maladroit, ses amours, ses rêves, ses maladresses.

Et moi je veux expérimenter autre chose. Dans ce deuxième épisode, je ne voulais pas qu'on me voit. Je voulais parler des étrangers, de la multiculture, du cosmopolitisme, du contexte européen, folklorique, social et historique, avec les foules des nouvelles migrations, de la nouvelle Belgique. Une grande fresque.! L'épisode devait, devrait s'intituler d'ailleurs Étranges Etrangers.

Qu'on me comprenne bien. Avec BABEL, je ne voulais pas faire un film, le film était nécessaire à ma vie, à trouver un équilibre, à oser quelque chose, à tenter de sortir de ma solitude, de ma dépression (un grand mot, un peu exagéré).
Et peu à peu, j'ai fait ce que j'avais prévu, rêvé, écrit. À force de répéter que je faisais un film, j'en ai fait un film. De dire que j'allais partir au Mexique, je suis parti.

A force de filmer, le film est devenu un film.


Et bien entendu, je n'arrivais jamais à filmer «tout» ce que je voulais filmer. Tout était à côté, tout était raté. J'avais ce sentiment de l'échec, je n'arrivais à rien, ce n'était pas seulement une question de moyens, ni de savoir-faire. C'était surtout que personne ne croyait à mon projet, tout le monde était contre, même ceux qui étaient avec moi, qui m'aidaient. Ce sentiment m'est resté très longtemps, et puis un jour, j'ai commencé à monter ces images, à les regarder de nouveau, à les classer, avec Daniel, et à trouver un peu d'argent pour le "terminer" (aussi un mot exagéré). Et le film est devenu "culte". On l'a trouvé extraordinaire. Une association de spectateurs (environ 5300 personnes éparpillées dans 17 pays) l'a déclaré "meilleur film de tous les temps". Et maintenant on voudrait que je continue. Sans argent bien entendu, comme d'habitude

BABEL: c'est le film de tout le monde. Tout le monde peut en faire autant. Alors pourquoi personne ne le fait? Parce qu'on préfèrera toujours une petite histoire de cul. Que Boris fasse le sale boulot. Il aime tant se montrer, se moquer de lui, se prendre comme cobaye.

En même temps que BABEL, j'ai fait beaucoup d'autres films. Font-ils partie du film ou non, je ne le sais plus vraiment, j'ai commencé à mélanger tout ça, à m'y perdre.

A-t-il filmé la mort au travail? le temps? la traversée des miroirs? Des éléments de réponse doivent se trouver dans son oeuvre. A quand une intégrale Boris Lehman?


Je revois ces images de moi, et des autres, mes amis d'alors, quelques uns déjà morts, que j'avais écartées par pudeur, ou par peur.

Un autre montage les auraient tirés du néant, aurait redonné vie à ces bouts de pellicule, appelés improprement chutes, ces réserves désignées par les initiales NU (non utilisés) ou IN (inédits ) ou encore EA (en attente).

Je les revois maintenant, avec ce sentiment coupable.
Comme si j'avais enfermé ces gens dans ma boîte noire.

J'ouvre la boîte maintenant. Qu'ils s'échappent, et retrouvent leur liberté,et leur jeunesse.

La patine du temps est là, mais tout au contraire des rides, c'est un bain de jouvence qui me les révéle à nouveau, Faust à l'envers, véritable miracle de la résurrection.

Je revois toutes ces images et je pleure. (on voit une larme couler de mes yeux)


Boris Lehman entreprend de faire le tour de soi depuis longtemps, en filmant toujours la même chose, répétant, variant à l'infini, revenant sur les mêmes lieux, refilmant les mêmes personnes, filmant toujours le temps qui passe, de la naissance à la mort.
Ses "archives" prennent évidemment tout leur sens aujourd'hui. Qu'a filmé Boris Lehman pendant toutes ces années, en dépit de toute reconnaissance nationale et officielle? Lui seul a filmé son époque comme aucun film de fiction ni même documentaire n'a su le faire. lui seul s'est établi l'arpenteur, l'archéologue, le sociologue, le cinéaste de notre temps. "Notre cinéaste" devrions nous dire, en l'adoptant comme un ami, ce qu'il a été pour beaucoup, et tous ceux qu'il a filmés.



Traversant la cinquantaine, il se dit en lui-même "suis-je, ai-je été,un homme heureux"?

Il poursuivait sa vie, son petit bonhomme de chemin, son chemin de vie,sans presque s'en rendre compte, allant toujours de l'avant, accumulant, collectionnant des souvenirs à n'en plus finir, sans beaucoup se retourner. Aller donc sans retour.

Ce petit bonhomme qui n'était pas Charlot
un peu ballot
encombré comme pas un
réinventant sa vie au fur et à mesure de ses besoins

plus fatigué à 50 ans qu'à 40
mais un docteur italien lui avait dit qu'il avait un cœur de trente ans" et une autre à qui il rendit la visite médicale l'avait traité de "malade imaginaire".

Il pensait faire de l'ordre dans sa vie et c'était le chaos, chaque fois pire, il croyait à un mieux, à un miracle et il attendait toujours sa princesse qui ne venait pas.
Enfant il est resté et restera.

Combien de cinéastes se disent: «filmons ça, quelle bonne idée!» Et finissent par la filmer.
Il ne filmait jamais ainsi. Pour lui,le film était sa vie. Il ne cherchait jamais une idée. Il cherchait les moyens de filmer sa vie. Et donc sa vie a parfois été organisée en fonction du filmage.

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Beaucoup de choses m'ont échappé. Par exemple, cette plaque Grand Place: "ici fut fondé la parti ouvrier belge" là où se trouve le restaurant le Cygne. La plaque sur la façade de la maison où Audrey Hepburn est née, rue Keyenveld. Beaucoup de choses ont changé. Sans cesse recommencer.Julio Cortazar est aussi né à Bruxelles. Je serai toujours en retard, et toujours incomplet, faux,et démodé.

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LES IDÉES VIENNENT EN FILMANT

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BABEL IV: Longtemps je me suis trompé

J'habitais dans les villes; dans l'agglomération, dans le centre. A présent je suis au plus près de la terre, près des arbres et des fleurs, des pierres et des insectes aussi. j'ai quitté le béton damné des enfers urbains.

je suis content d'être arrivé jusqu'ici.


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Je reprends c’est le 17 avril 1999

On peut voir tout ça de manière plus pessimiste, et même tragique.

Par exemple dire que je n’ai plus que 13 jours à vivre.

Le chauffage de la rue Labarre a cessé de fonctionner. Bientôt ce sera l’eau, le gaz et l’électricité.
La maison sera plongée dans le froid et le noir, elle disparaîtra corps et âmes, dans l’indifférence du bruit du monde.
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ici je note quelques bribes prélevées dans mon cahier chinois

24 avril

O mes intentions
O mon identité
O ma vie

c'est non
je préfère le trou noir

amnésie oublions
tâchons de vivre aujourd'hui
le temps présent

Les grands événements du monde ont traversé, ont pénétré mon corps (et mon cerveau) ont laissé des cicatrices profondes. ils sont là dans mon système nerveux enchevêtrés, emmêlés, comme l'eau qui s'infiltre dans la terre.

A la question: où ai-je été? et que s'est-il passé? dois-je répondre que je n'étais nulle part et que je n'ai rien vu?

Les grands changements, les guerres (mondiales), les exterminations, le Vietnam, l'Algérie,l'Indochine, l'Afghanistan,l'Iran, l'Irak,la Bosnie, le Kosovo, le Rwanda, Le Congo, l'Angola.. la Palestine.. et moi et moi et moi...

Mon corps s'est fermé oui, non ouvert au monde, mon corps a peur, il saigne, il souffre.


Tout change: les habitudes, la mode, le langage, l'histoire en marche, va de l'avant, nous entraîne dans son sillon,nous pose de nouveaux défis .Chaque jour nous devons être plus téméraire et plus courageux. Devant l'inconnu.

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mon chez moi.

Même ma table de montage n'est pas chez moi.
Je me suis mis chez les autres.

(j'appartiens aux autres)

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Ce qui est singulier ce n'est pas mon cinéma, c'est mon mode de vie.

Mon cinéma découle de mon mode de vie.

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Est-ce déjà le début de la fin?

Ai-je tout résolu, tout fini pour que je m'arrête?

ce film ne serait donc qu'un retour en arrière, qu'un morceau de vie rejoué, remémoré, gravé par les mots et les images?

ASSEZ DE NOTES CONFUSES

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L'ÉTAT NOMADE

Le nomadisme est un état d'esprit, un état d'être, je dirais. Il n'est pas question de parcourir des milliers de kilomètres, de marcher pieds nus pour être déclaré nomade, errant, non. C'est juste la façon de regarder le monde et d'y prélever des plaisir éphémères. Rien ne dure et rien n'est stable. Tout bouge et le nomade est le mouvement même, il va, peu importe où et peu importe qu'il arrive quelque part,il va, ça lui suffit, c'est un projet modeste en somme, mais qui dérange l'ordre établi. Quand justement vous voulez réserver une place dans un train pour aller à Paris, on vous demande toujours: quand voulez vous partir? quel jour? à quelle heure? SEUL OU accompagné? DANS LE SENS de la marche du train?, voulez vous être près de la fenêtre? fumez vous? etc.... vous devez tout prévoir, tout avoir prévu et même déjà le retour. parce qu'on veut surtout vous empêcher de voir

Car l'œil aussi doit être nomade. Nomade ça veut dire libre, libre d'errer, d'hésiter, de ne jamais se figer (donc de ne pas mourir, être un mort-vivant)

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26 avril

On me demande parfois: Boris qu'as-tu fait de ta journée? et je suis embêté de répondre, parce que pour moi c'est toujours plein et pour les autres c'est rien du tout. je n'ai rien fait, rien, aujourd'hui rien de bon, je tire la gueule, il pleut et c'est comme ça. Parfois c'est autrement, il fait beau, je souris, j'ai vu plein de gens, j'ai voyagé, pris le train, filmé, mangé...

Et pendant toutes ces années, il a beaucoup plu sur Bruxelles, on a fait beaucoup de trous, j'ai perdu beaucoup de cheveux.

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Que s'est-il passé dans les années 90?
1. Effondrement du Mur de Berlin (nov. 89) et
2. Effondrement de l'URSS (chute de Gorbatchev, Eltsine au pouvoir 91-92?)
3. La guerre du Golfe puis la Bosnie, le Rwanda, le Kosovo
4. Les accords de paix Israël- Palestine (les accords d'Oslo) l'assassinat de Rabin
5. Les années SIDA (déjà dans les années 80, Samy est mort en 85)

BEAUCOUP DE TEMPS PERDU A LIRE LES JOURNAUX

Voir les archives de la RTBF (Francis Colignon, Orosz Tibor, Michel Hekking)

1.Mort du Roi Baudouin 31 juillet 93 (Albert et Paola)
2.Belgique devient un état fédéral (accords de St-Michel 29 sept 92) autonomie des régions
3.Belgique atteint 10 millions d'habitants
4.Jean Luc de Haene premier ministre (92) succède à Wilfrid
Martens social chrétien flamand/ présente sa démission mars 93 mais refusée par le roi.
5.Wallonie économiquement déprimée.
6.Flamands tentent de revendiquer Bruxelles comme capitale de la Flandre
7.Banque Bruxelles Lambert avec ING Nederlanden groep alliances et regroupements pour assurer la survie et la compétition. Autres mariages bancaires.
8.SABENA avec AIR FRANCE puis SWISS AIR. Finiront par sombrer et disparaître.
9. 8% chômage
10.Dette publique (la plus élevée d'Europe)
11.Traité de Maastricht 17 juillet 92
12.Suppression du service militaire 1/1/94
13.Manifestation les tracteurs
14.Mobutu et le retrait de tous les belges
15.Affaire Dutroux et la marche blanche
16.Assassinat de Cools et le scandale AGUSTA.
17.suite irrésolue des tueurs du Brabant. (V. affiche)
18. Arrivée de l'euro.


Beaucoup de contes se passent dans les royaumes. Il y en a un de Grimm (l'intelligente fille de paysan) où le roi qui veut se débarrasser de la fille lui dit: "tu peux emporter quelque chose de mon royaume, je te fais un cadeau d'adieu. Tu peux me demander ce que tu veux, la chose la plus précieuse pour toi", que tu aimes le mieux. Et elle l'endort et l'emporte lui le roi, la chose la plus précieuse du royaume qu'elle aime le plus.

Ce qui était dit dans BABEL I (Tour de France, Concours Reine Elisabeth, Voyage en vacances, examens, embouteillages) est montré dans BABEL II

montage (début) on démolit (travaux) pigeons s'envolent du toit, Gilles avancent, on brûle bonhomme hiver, les pissenlits s'envolent. Un homme gravit une grue.

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BABEL II

Dans Lettre à mes amis restés en Belgique, je disais quelques vérités, "mes vérités" (mes 4 vérités) chacun pour soi pour sauver sa propre peau, que quand j'aurais été partout, je serais enfin moi, que je voulais tout filmer, je les redirais et encore plus: mon père ne laissait passer personne devant lui, quand il marchait dans la rue, j'avais cette impression de ne pas pouvoir le dépasser, il prenait toute la rue, c'était pour moi l'image de l'autorité .

Le bonheur l'image du bonheur je l'ai toujours vue dan un tram: 3 jeunes filles riant en toute innocence.

Aujourd'hui le film me rattrappe, je suis conscient (qu'est-ce qui m'arrive, qu'est-ce que je filme)

En filmant je me crée sous une forme chaque fois nouvelle, je me recrée, je suis multiple.

Il y a aussi des génocides culturels.


NADINE: elle est toujours là et elle sera toujours là.
Très longtemps que nous ne vivons plus ensemble. Avons nous seulement vécu ensemble?

Tout ce que je peux dire, c'est qu'elle est toujours là, changée, belle et fragile, forte et résistante.

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quelques ajouts mai 2001


Ressusciter les vieilles images, les images perdues, enfouies, presque effacées, indéchiffrables bientôt.

En revisionnant les bobines entreposées dans la cave de la rue Giron, je me suis aperçu d’abord qu’elles étaient assez intactes, et qu’elles ne dataient pas en quelque sorte, qu’elles étaient toujours présentes, je veux dire, qu’elles se conjuguaient au présent « Un présent parfait » écrivait Jacques Dapoz (V.Lettre).


Les petits mots qu’on se laissait sur les portes et sur les meubles.


J’ai constaté que déjà c’était dur de rassembler les gens, et aujourd’hui, plus que jamais, cette difficulté est grande. Les gens ne se laissent pas faire aussi facilement, ils fuient, ils ont peur (de moi, de la caméra, de leur image) il n’y a qu’un amour fort qui peut faire le lien. ou une forte admiration: je pense à Anne Grèzes par exemple ou à Yaël Wischnevsky, pour prendre deux exemples récents.

Rassembler les gens, les réunir par le film, (comme si on les reliait avec une corde, un fil, c’est ça le cinéma, mon cinéma, ma mise en scène, ma mise en page, mon montage. Simple comme bonjour? Non pas si simple que ça. Je m’arrache les cheveux, littéralement, je dois tout tirer vers moi, rien ne vient «naturellement». Je n’arrête pas de téléphoner, à Béatrice, à Véronique, je n’arrive plus à filmer Mirko ou Roland, à Philippe Boesmans, à Chantal Akerman, je finis par avoir peur de leur téléphoner, par hésiter, me dire que c’est trop tard, que c’est pas si important, qu’ils se foutent de ma gueule, qu’ils ne m’aiment pas, et quand ils finissent par accepter, ce serait plutôt par pitié.

Je devrais prendre les bobines comme elles sont, et les commenter, ah oui je me souviens, Maddy, elle était en pleine forme, pas encore trop délirante, et Magali aussi, souvent abandonnée par le film, voilà Jacques , je le filme depuis 30 ans et à chaque fois, il disparaît au montage, c’est pas moi c’est le film qui l’éjecte. Cette fois j’étais sûr d’avoir fait une scène capitale, et bien elle est tombée. Avant, on pouvait voir Jacques et ses amies, Lucie, Martine, et maintenant, c’est Marie-Odile, qui voit les photos de ces autres- là

Il y a moi, bien sûr, plus jeune, plus beau, avec des cheveux, ce moi là s’éloigne chaque jour, je ne savais pas au moment où je me filmais que je me verrais comme ça aujourd’hui, c’est une drôle d’impression, mais aussi tous ces morts, Marcel, Rachel, Hadelin, Micheline, Patrick, Johan, Fernand, Henri, Yvon et beaucoup d’autres que je n’ai pas filmés.

De trop attendre

de ne pas le faire

je m’en veux

je ne suis pas content



Donc BABEL II serait ( en partie) BABEL I revisité, recommenté

je voulais faire ceci, je ne suis jamais arrivé, je voulais, je voulais, non je ne voulais rien et en même temps, j’étais très exigeant, peut-être insupportable, je ne m’en rendais pas compte.

je tournais peu, trop peu (et maintenant je regrette)



Plan définitivement provioire de BABEL

Commencé en 1983 à Waterloo, Babel s'est précisé au cours des années. je suis à même aujourd'hui de préciser les grandes lignes de ce projet qui doit être mené à terme, si Dieu me prête assez de temps de vie .

1.Babel - prologue (Waterloo 1983)/ Lettre à mes amis restés en Belgique/ Le retour (1983-1990) (1 prologue et 2 parties/ 8 bobines) durée: 6 heures 20 minutes

2.Tentatives de se décrire (1989-1995) (2 parties / 5 bobines) / durée: 2 heures 40 minutes

3.Histoire de ma vie racontée par mes photographies (1995-2000) 5 bobines/ durée: 3 heures 30 minutes

4.Homme Portant (1989-2002) 2 bobines/ durée: 1 heure 1 minute

5.Mes 7 Lieux (1999-2005) déjà tourné mais non encore monté (contient: La théorie des caisses, Histoire de la veste) durée estimée à 3 heures 30 minutes

6. Histoire de mes cheveux (2006) (contient: le voyage en Sibérie) / durée estimée: 1 heure 45 minutes

7.Le retour d'Ulysse (2006-2007)/ durée estimée: 2 heure 30 minutes

8 Le rêve de Kafka (2008) : dans le rêve de Kafka, on me verra les yeux bandés comme au début de Babel, je serai placé devant un très grand feu (allumé par mon amie Séverine Hubart), dans lequel tous mes objets, tous mes films, mes vêtements, toute ma vie en somme sera jetée, pendant que mes amis chanteurs et musiciens joueront de grands airs / durée estimée: 1 heure

9.Mes enterrements (2009) ( ce qu'on imlagine de sa mort, avec l'envie de la mettre en scène; où l'on voit comment on choisit le lieu de sépulture, le cercueil, tous les détails des funérailles, et les instants d'après / durée estimée: 1 heure 30 minutes

10.A la recherche de mon temps perdu (2009) durée estimée: 1 heure

11. Comment l'Histoire est entrée en moi (2010) cet épisode ne comportera que des archives embrassant soixante ans d'histoire, commençant au lendemain de la deuxième guerre mondiale, aux environs de ma naissance pour se terminer dans les premières années du 21e siècle. J'aurai complètement disparu des images et en même temps je serai partout.